Faire un article sur le Yoga, c’est ambitieux.
Faire un article pour dire que le Yoga n’est pas du tout qu’une pratique des asanas, des postures, c’est plus accessible, et c’est surtout plus juste.
Il est très important que le Yoga soit reconnu pour son Traité, rédigé par l’érudit Patanjali, qui a fait les célèbres Yoga Sutras, et lui a donné son fondement moral, éthique et philosophique.
Les temps actuels l’ont aliéné de la source-même de sa conception, de sa raison d’être.
Présentation des 8 piliers du Yoga
Dans ses commentaires sur les Yoga Sutras "Light on the Yoga Sutras of Patanjali " , B.K.S. Iyengar nous dit:
« Historiquement, Patanjali semble avoir vécu vers 500 ou 200 ans avant J-C. Mais l’essentiel de ce que nous savons de lui vient de légendes : Il est considéré comme un svayambhu, une âme évoluée qui a choisi de se réincarner pour aider l’humanité. Il a revêtu une forme humaine pour expérimenter nos joies et nos peines et apprendre comment les transcender. Dans les Yoga Sutras, il décrit les moyens de dépasser les tourments du corps et de l’esprit, obstacles à l’évolution spirituelle.
Ses propos sont directs, originaux, et traditionnellement considérés comme d’inspiration divine. Plus de vingt siècles plus tard, ils sont toujours actuels, fascinants, universels et complets. Ils le resteront sans doute pour les siècles à venir.
En 196 aphorismes, ou sutras, il traite de tous les aspects de l’existence, commençant par un code de conduite éthique pour finir par la vision de notre véritable nature. Chaque terme des sutras est d’une extrême concision et précision; chargé de sens. De même que la moindre goutte de pluie participe à la formation des océans, tous recèlent réflexion et expérience et sont indispensables à l’ensemble. »
Voilà pourquoi écrire sur le Yoga et expliquer la richesse de la discipline passe par les Yoga Sutras de Patanjali, et par les huit piliers qu’il donne au Yoga.
Patañjali écrit : « Yoga chitta vritti nirodha » ou « le Yoga est l’arrêt des fluctuations du mental », celles qui stimulent la souffrance et la confusion de l'égo, parce qu’il est confondu avec le Soi.
Bienvenue dans le monde merveilleux du Yoga, un héritage de l’humanité qui est selon moi une partie intrinsèque des valeurs humaines.
Les 5 premiers membres sont dits externes (Bahir-Anga) car ils concernent la vie sociale, le corps physique, la respiration et la dimension spirituelle.
Les 3 derniers membres dits internes (Antar-Anga) développent plus spécifiquement la sphère spirituelle.
Les huit branches Yamas, Niyamas, Asana, Pranayama, Pratyahara, Dharana, Dhyana et Samadhi sont ni dispensables, ni séparables.
Les cinq Yamas sont des règles sociales, et donnent les points d’une juste relation avec l’environnement social : l’éthique
・Ahimsa, ou non-violence
・Satya, ou vérité (être authentique)
・Asteya, ou non vol (ne pas prendre des choses qui ne me sont pas données)
・Brahmacharya, ou se déplacer en Brahman (infini) : l’abstinence ou la chasteté et la modération (s’éloigner de ce qui peut trop me distraire)
・Aparigraha, ou non-accumulation: non-possessivité, sobriété (ne pas être avide, ne pas prendre plus que ce dont j’ai besoin)
Ces cinq principes sont de nature universelle. Leur compréhension et, plus important encore, leur intégration et application, changent toute la texture de notre pratique (physique).
Niyamas peut être compris comme la culture de soi, la discipline. Pour être plus claire, il s’agit de l’auto-discipline, ou de la juste attitude que l’on a vis à vis de soi
・Shaucha, ou pureté physique : être propre et ordonné
・Santosha, ou contentement : se contenter, reconnaître ce qu’il y a de bien dans notre vie
・Tapas, ou endurance : le travail, cultiver l’effort, la discipline
・Swaadhyaaya, ou étude personnelle : apprendre sur soi-même, se connaître soi-même, études des textes de connaissance
・Ishwara Pranidhaana, ou dévotion au Divin : le lâcher-prise, la dévotion (s’en remettre à l’univers, reconnaître qu’on ne peut pas tout contrôler, s’en remettre aux effets de notre pratique)
“Être fermement et tranquillement établi dans la présence à soi.”
La posture mobilise les différents plans physique, émotionnel, mental, spirituel et vise l’harmonisation de tous ces plans, en utilisant à la fois la force et la souplesse, et évidememment, l’alignement juste du corps.
- Posture culturelle : exerce le corps physique, améliore la circulation des énergies, favorise la stabilité corporelle (et mentale).
- Posture méditative : pratiques plus intériorisées si le corps et le mental sont canalisés.
- Pranayama : contrôle ou régulation du souffle
La définition de l’asana par Sri Sri Ravi Shankar : « Ressentir le corps, lâcher l’effort et expérimenter l’infini, c’est Asana ».
L’asana a pour principe le jeu entre la fermeté, la stabilité (Sthira) et le confort, l’aisance (sukham), il s’agit de trouver le juste milieu pour perfectionner sa posture. Un élément essentiel du recueil : le jeu du yin et du yang, du Ha (soleil) et du Tha (lune), les principes extrêmes qui se complètent et s’harmonisent.
L'asana est à la fois la parfaite fermeté du corps, la stabilité du mental, et la bienveillance de l’esprit.
Patañjali ne parle que très peu de postures dans ses Sutras, ce précepte étant valable en tout instant de la vie.
Le mot prana recouvre de nombreuses acceptations : le souffle, la vie, la vitalité, la force, le vent, l’énergie.
Facilitée par la pratique des postures (assouplissement, conscience du corps), la régulation du souffle améliore grandement l’homéostasie générale de l’individu et sa capacité de concentration mentale.
Tandis que l’homme ordinaire respire pour survivre, le yogi respire pour vivre.
Différentes techniques de Pranayama sont décrites par Patanjali dans les Yoga Sutras.
Pratyahara est la toile intérieure, la référence du monde intérieur et l’incitation des sens à se retirer vers l’intérieur.
Elle est fondamentale pour cultiver une pratique qui n’est pas rejetée par les fluctuations externes du corps, des sens et des circonstances. Diverses méditations guidées sont utiles pour inviter l’esprit à plonger vers l’intérieur.
Le détachement, le bien-être ne dépendent alors plus du conditionnement des sens ; nos cinq sens sont constamment attirés par le monde extérieur (les sons, les objets…) à un point tel que nous sommes décentrés.
Pratyahara est une invitation à se souvenir et à cultiver notre propre nature.
L’aptitude à soutenir l’attention sans se laisser distraire.
« L’écoute subtile des sensations, de la respiration, des pensées qui passent, ou ne passent pas »
Ici le yogi concentre sa conscience sur un objet externe (une image, une pierre, un mandala, un son, ou mon préféré, la flamme d’une bougie) ou interne (le souffle, une image mentale, la récitation muette d’un mantra, les bruits de notre corps, la vision de l’espace avec les yeux fermés).
Pendant la concentration, l’esprit n’a de cesse de se focaliser sur l’objet choisi et engendre un flux d’images et de sensations qui ne concernent que lui. Cette concentration exclusive nous fait perdre la perception de toute autre sensation, d’abord durant quelques secondes, puis pendant la durée totale de la séance.
Dharana et Dhyana sont parfois considérés comme interchangeables.
Dharana et Dhyana sont intimement liées au Pranayama, un bon exemple de pourquoi aucune branche n’est séparée de l’autre.
C’est l’étape ultime du Yoga, on ne voit plus les différences entre les êtres, on se sent uni avec le tout, connecté avec l’univers.
L’équanimité. « c’est l’aptitude à devenir un avec l’objet perçu ».
Mircea Eliade nomme cet état “enstase”, par opposition à l’extase.
Samadhi a longtemps été considéré comme un but trop élevé pour l’homme ordinaire.
Le don du yoga est l’occasion d’expérimenter l’être tout entier, pas seulement le corps. Pourquoi se contenter de moins ?
Comme le disent beaucoup de Maitres de Yoga, sa pratique mène à la libération, à la joie, à la réalisation de la vie.
Elle permet un centrage et développe une force précieuse, celle de garder l’équanimité, de profiter de l’instant présent, et d’être dans son véritable chemin.
La pratique du Yoga ne mène pas à devenir un individu parfait, puisque cela n’existe pas. Cela dit, elle donne des clés pour être heureux, et garder une bonne santé. Ce qui est clairement déjà beaucoup, puisque ces mêmes clés sont celles qui ouvrent la voie du bonheur.
Les Yoga Sutras, Patanjali
La Bible du Yoga, BKS Iyengar